
Ils donnaient l’image de ces couples qui rendent heureux des observateurs dénués de jalousie. Elle était belle. Il était beau. Ils étaient beaux. Je ne parle pas ici de cette beauté plastique qui fait parfois horreur, mais d’un homme et d’une femme tels que notre imaginaire d’occidentaux français se les représentent. Notre prince était certes un peu empoté avec de grands yeux bleus, mais juste ce qu’il faut, plus grand qu’elle, instruit, riche, moderne, d’esprit vif, promis à un avenir professionnel toujours plus accompli parce que sorti d’une bonne école de commerce. Il ne lui manquait que cette hauteur d’esprit que seule l’université française cultive encore dans notre pays. Reste qu’il gagnait bien sa vie, et qu’il avait une femme qui le complétait à merveille. Jolie psychiatre venue du Liban, elle incarnait cette délicatesse de la femme orientale tannée par le soleil, douce et mystérieuse à la fois avec des cheveux longs et des yeux en amandes. Comme tant d’autres, elle avait dû fuir son pays miné par les guerres tribales et la corruption, cherchant un avenir meilleur en France, et peut-être surtout : un mari. Là-bas, les familles s’étaient entre-tuées pour défendre leur clan. Les hommes étaient restés sur le carreau. Et les femmes aussi en quelque sorte, bien vivantes, mais privées du pouvoir de se reproduire parce que ne trouvant plus de partenaire disponible, chez les chrétiennes en tout cas, qui ne sont pas polygames.
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