Publié le 16 octobre 2018 par Léonidas Durandal à 8 h 30 min
La traduction française du titre de ce film en dit long sur les hésitations de notre doxa. L’expression « faute de » désigne une absence. Mais « Faute d’amour » peut aussi signifier un amour qui serait fautif.
Il est bien connu que par essence, le traducteur est un traître. Ici, celui-ci introduit l’idée d’une histoire personnelle qui ne concernerait qu’un couple seul, dont nous serions les voyeurs, couple fautif de s’être mal aimé. Il n’en est rien. Loveless a un caractère universel. Ce film ne raconte pas l’histoire d’un couple qui divorce, mais décrit avec une précision toute artistique un processus de séparation qui est celui de l’absence d’amour.
Sans en raconter véritablement l’histoire, d’ailleurs y-a-t-il une histoire dans ce film, je voudrais recenser les idées universelles dont il traite :
Une histoire parentale bancale. Basée sur un amour passion, mal défini, qui cache des réalités traumatiques vécues dans l’enfance, les parents divorcés se transmettent de génération en génération, une absence d’amour. Génia, la mère, rejette son fils comme elle est rejetée par sa mère. Boris, le père, n’a pas d’histoire. Or un père sans histoire, sans filiation, n’est pas un père.
– Une passion qui cède la place à une autre. Tourmentés par leurs sentiments, ce couple parental passe d’une relation à une autre en croyant toujours que l’avenir leur appartient. Incapables de remise en question, ils reproduisent des erreurs dont ils sont responsables. Mais ils chargent l’ancien partenaire de tous leurs malheurs.
L’absence d’amour est souvent un laisser-aller qui ne voit que par soi, un narcissisme d’enfant encore dans le sein de sa mère. Quand l’enfant possède le sein, il est heureux. Quand il lui est retiré, il braille. L’adulte immature se comporte ainsi. Les règles du monde lui échappent, et il est incapable d’accepter la fatalité ou de comprendre le sens d’un engagement. Ici, Genia et Boris retrouvent un nouveau partenaire et croient tous les deux vivre une histoire différente. Très vite, ils feront face aux mêmes écueils. Génia s’enfermera dans un non sens individualiste. Boris verra son nouvel enfant comme une gêne. Et pour tous les deux, quand la flamme bestiale de la passion se sera éteinte, il ne leur restera plus rien.
Nous sommes le fruit d’une histoire dont nous pouvons être aussi les prisonniers, si nous voulons l’ignorer. Les enfants de divorcés divorcent encore plus statistiquement que les autres. Ils subissent un monde individualiste jusqu’à la mort de toute descendance, jusqu’à ce qu’ils méconnaissent à plein la notion de filiation (hommes) et d’accueil (femmes).
–L’enfant de divorcés et la fuite. Aliocha a cette beauté universelle de l’enfant tourné comme un forcené vers la vie. Il voudrait avoir une place en ce monde. Mais la matérialité de sa propre existence ne peut lui suffire. Il lui faudrait être aimé pour accepter de continuer en ce « >